[Alain Bernard, président de l'ACAB]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0741 FIGRPT0065B 11
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 24 x 18 cm (épr.)
description ACAB = Association des commerçants antiquaires et brocanteurs.
historique En sautant de la Feyssine à Vaise, les Puces ont perdu les licences de leurs bistrots. Jusqu'à présent, on jouait sur les prolongations. Mais la dernière tournée est bel et bien programmée ce dimanche 2 janvier 1994.
historique Finie l'andouillette moutarde sur un coin de nappe en papier. Adieu cafés serrés et croissants de la veille. Rayés de la carte les alignements militaires des pots de mâcon. Après avoir été aseptisées, privées de tout déballage privé, les Puces de Vaise passent au régime sec et les trois troquets ayant survécu au grand déménagement de la Feyssine sont sur le point de baisser le rideau. Ce dimanche d'Epiphanie semble devoir être le dernier où l'on pourra, en vertu d'une expression authentiquement XVIe siècle, "charmer les puces", c'est-à-dire boire, sur le terrain, entre chineurs de bonne compagnie. Parce qu'ils faisaient pour ainsi dire partie des meubles, les patrons des bistrots de la Feyssine ont été relogés sur le site temporaire de Vaise. "C'était à prendre ou à laisser", raconte l'un d'entre eux, "aucune des conditions ne pouvait être discutée, nous n'avons pas discuté. On se doutait bien qu'il pouvait y avoir un problème de transfert de licences, mais c'était une administration, la ville de Lyon, qui nous faisait signer de nouvelles conventions. On nous disait qu'existaient des exceptions". Mais il se trouve que ce dossier de transfert de licences a d'abord été traité, avant sa mutation, par un procureur qui n'avait pas envie de faire d'exception et surtout pas au profit de la ville de Lyon. Il s'agit de Paul Weisbuch qui, dans l'affaire Botton notamment, a publiquement développé des thèses qui lui ont valu une mutation en forme de placard. Le dossier des débits de boissons ne s'en est pas mieux porté pour autant. Deux fois prolongées, les autorisations arrivent aujourd'hui à leur terme et toutes les administrations en présence observent la position du voisin. La police transmet les recommandations de la justice, la justice dit qu'une licence n'est transférable que sur un lieu touristique, les douanes demandent ce que pense la ville de Lyon et la ville de Lyon s'en remet à la justice. "Il suffirait que la ville dise qu'elle ne voit pas d'inconvénient à notre installation temporaire pour que tout se débloque, mais elle ne dit rien et la police municipale nous a bien précisé que ce 2 janvier serait le dernier". Outre la perte d'un investissement qu'ils estiment, selon les cas, entre 50 et 150.000 francs, les cafetiers craignent surtout d'être supplantés par d'autres, possédant déjà licence sur le 9e arrondissement. Michèle Mollard, maire de l'arrondissement en question, dément toute stratégie d'éviction : "Si on les a fait venir, ce n'est certainement pas avec l'intention de les faire partir trois mois plus tard, nul ne cherche à les chasser, il n'y a aucune liste d'attente de personnes du 9e désirant prendre leur place". Le service des marchés de la ville de Lyon veut, de même, croire à une solution à la petite semaine : "Nous prolongerons le plus possible car ce serait totalement injuste qu'ils soient évincés", mais le même service confirme l'existence d'une liste d'attente, "tout le monde est intéressé par ce marché". Coincés par le droit d'un côté et, de l'autre, peu enclins à se retourner contre la ville de Lyon dont ils dépendront peut-être lors d'un nouveau déménagement, les taverniers des puces ont pourtant décidé de résister. D'occuper leurs stands au-delà de l'Epiphanie pour bien montrer qu'ils sont locataires des lieux, au même titre que les brocanteurs et parfois membres, comme eux, de l'ACAB, association des commerçants antiquaires et brocanteurs du site de Vaise et (aux dernières nouvelles) de la région. On peut difficilement faire plus large et plus oecuménique. Présidée par Alain Bernard, cette association réunit près du tiers des marchands de Vaise, mais doit surtout sa représentativité au désert qui l'entoure et au flou géographique qui plane encore sur la brocante. Plus de structure syndicale en région, pas l'ombre d'une association vraiment concurrente, l'occasion était trop belle : L'ACAB se veut l'interlocutrice du gestionnaire en place, qu'il s'agisse de la ville de Lyon comme c'est actuellement le cas, ou d'un privé, comme cela se profile. Et pour affirmer son pouvoir, l'ACAB ne laisse rien passer et surtout pas ce qu'elle nomme un fiasco, celui de la vente caritative organisée le 19 décembre [1993]. "Une honte, dit Alain Bernard. Sans concertation aucune on nous impose une ouverture toute la journée et on se retrouve avec trois pelés un tondu. Si c'était nous qui avions rassemblé les lots, aucun brocanteur n'aurait osé donner la drouille qu'on a vu parfois passer. Et personne n'aurait pu laisser brader ce qui était de qualité. Voilà où on arrive en refusant de nous entendre, en nous recevant entre deux portes sans prendre en compte nos projets, sans formaliser de réponses". Face aux gestionnaires municipaux qui naviguent à vue entre les rivalités et qui ont l'impression de faire au mieux, l'ACAB se voudrait donc fédératrice. Protectrice du marchand et de ses mètres carrés lorsque, par exemple, les conventions d'occupation précaire sont tout à coup amputées d'une de leurs clauses par de nouveaux arrêtés municipaux. Cette semaine, d'ailleurs, un avocat doit se pencher sur le sujet. Enfin, désireux d'organiser lui-même une foire, une vraie, Alain Bernard voit d'un fort mauvais oeil l'instauration, toujours sans aucune concertation, de déballages à Eurexpo. "Et en plus, on nous annonce que ces mercredis là, il nous faudrait ouvrir nos stands sur Vaise, je ne suis pas d'accord, nous ne sommes pas des pantins". D'autres. pourtant, se bagarrent pour tirer les ficelles. Source : "Des Puces sans pot de vin" / Sophie Bloch in Lyon Figaro, 29 décembre 1993, p.1 et 4.
note à l'exemplaire Négatif(s) sous la cote : FIGRP12518.
note bibliographique "Un tiroir de plus pour les puces" / S.B. [Sophie Bloch] in Lyon Figaro, 8 novembre 1993, p.1.-

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